Dans les villes, le nombre de grandes enseignes implantant des magasins de type «city» ne cesse de croître. Ce constat se remarquait déjà chez les enseignes alimentaires et touche désormais les enseignes spécialisées. Des grands noms comme Leroy Merlin, Ikea ou Décathlon qui ont bâti leur concept de magasin en implantant de grandes surfaces dans les zones commerciales en périphérie des villes se lancent aussi sur ce créneau. Mais quelles sont les principales raisons qui poussent ces enseignes à ouvrir des magasins de proximité ?

Faire face au e-commerce

En France, le e-commerce ne cesse de progresser. En effet, il enregistre une croissance de 14% en 2017, après avoir été 11,5% en 2016, de 12,47 % en 2015 et 11% en 2014. Pour 2018, il a représenté pour 81,7 milliards d’euros pour 1,2 milliard de transaction. Et ceci n’est pas prêt de s’arrêter puisque la Fédération française du e-commerce estime qu’en 2019, le e-commerce aura franchi la barre des 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

Les enseignes spécialisées sont concernées par ce phénomène. En effet, le e-commerce représente par exemple 22% des ventes de produits high-tech, 27% du textile maison, et 17% de ventes d’électroménager. Même le secteur du bricolage ne résiste pas à cette tendance puisque 6% des ventes sont effectuées en ligne, et les prévisions tablent sur 13% pour 2020. Ainsi, par le magasin de proximité, les enseignes se rapprochent du consommateur et profitent des avantages du magasin physique pour se démarquer d’internet. Ces avantages portent notamment sur l’expérience client en magasin. Il s’agit par exemple de la possibilité de tester de voir le produit, de le tester, d’être conseiller par un vendeur, d’acheter le produit immédiatement, et de bénéficier d’une assistance pour son utilisation.

S’adapter aux nouveaux modes de consommation

Après avoir connu ses heures de gloire, le concept de grande surface en périphérie des villes commence à s’essouffler. Les consommateurs perçoivent de plus en plus comme une corvée le fait de prendre sa voiture pour se rendre en magasin de périphérie et estiment perdre leur temps dans les grandes allées des formats hypers. De fait, ils désirent faire leurs courses rapidement et dans un point de vente proche de chez eux. De plus, on remarque que les clients attachent de plus en plus d’importance à la relation client-commerçant. Une étude du CREDOC, datant de 2011 nous indique que « l’avenir semble être à la proximité […] Une importante majorité de répondants (69 %) [décideurs d’entreprises de distribution et responsables d’organisations professionnelles] anticipe un renforcement au cours des 10 prochaines années du poids des petites surfaces de proximité ». Elle ajoute que pour 75% de ces mêmes spécialistes, le format hyper en périphérie semble « condamné à reculer ». La proximité devient alors indispensable. Cette proximité débouche sur une relation de confiance entre l’entreprise et son client. Cette confiance fera la différence pour la performance de l’entreprise face à un consommateur volatile et confrontée à une offre pléthorique.

Profiter du dynamisme commercial des centres-villes

Dans les grandes agglomérations, Le taux de vacance commerciale est faible (environ 7 %) et les enseignes installées y réalisent d’excellents résultats. Dans les villes de Strasbourg, Bordeaux ou Nantes, le chiffre d’affaires des commerçants du centre-ville dépasse les 1 milliard d’euros. La diversité de l’offre proposée (habillement, high-tech, culture, produits de la maison) mais aussi la présence de pôles d’attractions comme des lieux culturels ou historiques, des bars et restaurants, des centres commerciaux dans le centre expliquent ces performances. De plus, les grandes agglomérations profitent d’infrastructures développées pour attirer la clientèle potentielle. Il s’agit notamment des réseaux de transports en commun performants, de parking à proximité des magasins, et d’une bonne coordination entre zones piétonnes et zones accessibles en voiture.

Des consommateurs attachés aux centres-villes

Les français attachent de l’importance à leur centre-ville. En effet, une enquête réalisée en 2016 par l'institut CSA nous montre qu’une large majorité des français, 59 %, se déclare attachée aux centres-villes. C’est d’autant plus le cas pour les jeunes puisqu’ils sont 65 % chez les 18-24 ans. Les centres-villes sont des endroits où on aime se promener, passer du temps, visiter les boutiques, et très souvent ceci a pour conséquence que l’on succombe à un achat imprévu. De plus, 73% des Français se rendent au moins une fois par semaine dans leur centre-ville. Enfin, il reste l’endroit dans lequel faire ses courses pour 43% des interrogés.

Une population de plus en plus urbanisée

Le pourcentage de la population vivant dans des villes ne cesse de croître. Il est en effet de 75% en 2000, 77% en 2005, et 80% en 2016. Ce phénomène n’est d’ailleurs pas prêt de s’inverser. Une part importante des habitants ne possède d'ailleurs pas de voiture. Par exemple, 34% de la population est sans voiture à Nice, 35% à Bordeaux, 37% à Strasbourg et 42% à Lille. Difficile alors pour ces urbains de se rendre dans un magasin situé en périphérie. Ainsi les enseignes souhaitent développer leurs concepts de magasin en rendant accessibles leurs offres aux urbains.

En définitive, les enseignes spécialisées répondent à la croissance du e-commerce, s’adaptent aux évolutions des attentes et manières de consommer des clients et à l’urbanisation croissante. Elles désirent aussi bénéficier du potentiel commercial des centres-villes des grandes agglomérations et de l’engouement des consommateurs pour ces derniers. Le commerce de proximité marque à coup sûr son retour, mais il a évolué. Il serait alors intéressant de connaître quelles sont les évolutions mises en place par les grandes enseignes dans les magasins de proximité, et comment elles y développent l’expérience client.

Sources :

  • Fédération du e-commerce et de la vente à distance, 2017
  • Urbanisation de la France, INSEE, 201
  • Palmarès PROCOS des centres-villes commerçants, 2015
  • Baromètre du centre-ville et des commerces réalisé par l'Institut CSA, 2017
  • Etude sur les comportements liés aux courses depuis 1974, INSEE, 2010
  • Le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Credoc), étude prospective sur le commerce en 2020, 2011.